
La forêt ça nous gagne !
Adapter les forêts aux effets du changement climatique, un enjeu essentiel et une stratégie d’actions
Les forêts, quand elles sont gérées de manière durable, rendent de multiples services à la société : contribution à la qualité de notre cadre de vie et de nos paysages, production de bois – à la fois énergie renouvelable et matériau de construction durable – pourvoyeur d’emplois locaux, préservation d’une biodiversité riche, accueil du public sous des formes diversifiées, prévention des risques naturels. En complément, ces forêts jouent un rôle majeur dans la lutte contre le réchauffement climatique : séquestration du carbone dans les écosystèmes, stockage de carbone dans les produits bois, substitution à l’utilisation d’énergies fossiles qui émettent fortement des gaz à effet de serre. La filière forêt-bois constitue ainsi en France un puits de carbone essentiel, qui compense près d’un quart des émissions de gaz à effet de serre du pays.
Encore faut-il que les forêts résistent au changement climatique pour qu’elles continuent à rendre leurs multiples services et qu’elles contribuent à en atténuer les effets ? Or, sur le territoire des Alpes-Maritimes et du Var, les dépérissements en forêts publiques, qui concernaient d’abord quelques secteurs ponctuels de montagne depuis la fin des années 1990, ont actuellement tendance à s’intensifier et à s’étendre sur des zones de basse altitude. Ils concernent principalement les forêts de Sapin pectiné, Pin sylvestre, Pin noir d’Autriche et Chêne pubescent.
Face à cette situation critique, la stratégie d’adaptation de ces forêts mise en œuvre par l’Office national des forêts fait appel à un panel d’actions :
Sylviculture préventive pour améliorer le bilan en eau et réduire les situations de stress hydrique ;
Diagnostic de la vulnérabilité des forêts sur la base des modélisations du climat du GIEC ;
Diversification des approches techniques et des espèces visées, en évitant une solution unique et incertaine ;
Reconstitution des forêts dépérissantes et diversification des forêts vulnérables avec un objectif de forêt « mosaïque », c’est-à-dire en misant d’abord sur les processus de régénération naturelle, en s’appuyant sur le peuplement sain existant pour l’enrichir en autres essences lorsque nécessaire, en veillant à maintenir le microclimat forestier.
C’est dans ce cadre que le volet forestier du Plan de relance prévoit de renouveler les forêts dépérissantes et vulnérables, en les diversifiant et en améliorant leur résilience vis-à-vis des crises climatiques à venir.
Plan de relance : l’État s’engage pour préserver les forêts de demain
Fin 2020, les acteurs de la filière forêt-bois et l’État ont scellé, par la signature d’une charte, leur engagement pour lutter contre le dépérissement forestier et la préservation de ces écosystèmes menacés par le changement climatique.
Le volet forestier du Plan de relance a été doté de 200 millions d’euros sur 2021 et 2022. Afin d’en assurer la réussite, plusieurs dispositifs d’aide ont été activés pour chaque maillon de la chaîne. L’ambition générale : dynamiser l’économie de la filière forêt-bois en adaptant les forêts au changement climatique et en contribuant à leur renouvellement pour piéger le carbone, protéger la biodiversité et répondre aux besoins en produits à base de bois, matériau écologique d’excellence.
Actions menées en forêts publiques dans le cadre du Plan de relance dans les Alpes-Maritimes et le Var
La majorité des forêts de ces deux départements sont vulnérables d’après le modèle d’évolution climatique du GIEC, qui évalue l’état des connaissances sur l’évolution du climat, ses causes, ses impacts. Le GIEC identifie également les possibilités de limiter l’ampleur du réchauffement et la gravité de ses impacts et de s’adapter aux changements attendus. Il est donc important d’intervenir pour accompagner la transformation inéluctable de ces forêts. Au cours de l’année 2021, sept chantiers de renouvellement des forêts vulnérables ou dépérissantes ont été réalisés dans les forêts domaniales des Alpes-Maritimes et du Var suivantes : Bas-Thorenc (06), Esclapon (83), deux chantiers distincts en forêt du Haut-Estéron (06), Lucéram (06), Maures (83) et Mazaugues (83), pour un total de près de 19 000 plants installés sur 53 hectares, et un montant total de travaux de 250 000 euros. Les faciès des forêts concernées sont variés et représentent un large échantillon de ce que l’on trouve dans les départements des Alpes-Maritimes et du Var. Ainsi, une série d’îlots forestiers d’essences plus adaptées au climat futur a été mise en place et constitue autant de zones d’avenir. En 2022, ces actions se poursuivent avec un objectif de 40 000 plants commandés pour les forêts domaniales et communales grâce à la mobilisation de communes forestières désireuses de s’engager pour favoriser la résilience de leurs forêts.
Choix techniques et sylvicoles
Ces projets d’adaptation des forêts au changement climatique sont conduits selon le principe d’une sylviculture la plus naturelle possible. La diversification par plantations s’opère lorsque la régénération naturelle n’apporte pas suffisamment de garanties (nombre et qualité des jeunes arbres) pour obtenir un peuplement forestier complet et viable face au climat futur. La plantation est donc mise en œuvre dans les situations qui présentent les meilleures chances de réussite, sur des surfaces modérées de l’ordre de quelques hectares, en recourant à chaque fois à un bouquet de plusieurs essences ou « provenances » (lorsque les graines sont récoltées dans des régions différentes). Le choix des espèces tient compte de la future remontée naturelle en altitude des essences locales, et prévoit l’introduction d’essences de façon conforme à la réglementation existante et avec un suivi scientifique.
Les essences et provenances qui sont testées sont issues de régions méditerranéennes aux climats plus secs et chauds : Sapin méditerranéen, Cèdre de l’Atlas, Chêne faginé, Pin des Balkans, Aulne à feuille en cœur.
Ainsi, pour les projets des Alpes-Maritimes et du Var, les différentes essences ont été choisies selon celles qui apparaissent comme les plus adaptées au climat local, aux sols et aux modèles d’évolution des températures dans la région géographique. Pour cela, les techniciens de l’ONF se sont appuyés sur le modèle ClimEssences. Ce travail, issu de nombreuses années de recherche pluridisciplinaire et qui croise des données météorologiques avec les caractéristiques de plusieurs centaines d’espèces d’arbres, permet au forestier de sélectionner des essences qui auront le maximum de chances d’être adaptées au climat futur modélisé par les experts du GIEC.
L’adaptation des forêts au changement climatique, des emplois porteurs de sens
Sélectionnées dans le cadre d’une procédure d’appel d’offre publique, les six entreprises ayant effectué les travaux (production de plants en pépinières, travail du sol, plantations…) sont toutes situées dans le sud de la France. Les pépinières sont situées dans le Lubéron, en Ardèche, en Lozère ainsi que dans les Hautes-Alpes. Deux entreprises ont par ailleurs pu embaucher plusieurs personnes pour répondre à la demande de travaux en forêt dynamisée par le Plan de relance. Ces emplois créés ou consolidés grâce au volet forestier du Plan de relance sont non délocalisables, ils permettent la création de valeur locale, pour aujourd’hui et pour le futur, par des travailleurs locaux.
Crédit photo : Pixabay
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